Peut-on Travailler Pendant un Congé Sabbatique ?

Jeune femme au bord de la mer, en train de travailler pendant son congé sabbatique
Photo by Damir Spanic on Unsplash

Tu dois penser que je suis tombé sur la tête… « Peut-on travailler pendant un congé sabbatique ? », vraiment ? Quelle drôle d’idée !

Après tout, tu n’as quand même pas trimé pendant toutes ses années dans l’espoir d’une parenthèse dorée… pour craquer à 2 mètres du bol de sangria ? Si ? 😉

Eh bien figure-toi que nombreux sont ceux qui se posent quand même la question. Et cet article vise à les assurer que travailler pendant un congé sabbatique, c’est tout à fait possible. Comme nous le verrons rapidement à travers les aspects juridiques.

Mais je te sens toujours circonspect devant ce sujet au mauvais goût manifeste 😉 Me fais-tu un minimum confiance ?

Alors laisse moi ensuite essayer de te convaincre de l’intérêt de consacrer une partie de ta précieuse année sabbatique à travailler.

Tu verras que ça peut être la meilleure des façons de te préparer un avenir durablement meilleur. Ou simplement de te permettre de financer ton tour du monde tant espéré, si tu n’arrives pas à en boucler le budget.

Travailler pendant son congé sabbatique, ça peut donc être le pied de nez ultime au système. Celui qui te permettra enfin de réaliser tes rêves ! 🙂

Travailler pendant un congé sabbatique : le cadre légal

Les textes de loi sont très clairs sur ce point. Pendant son congé sabbatique, il n’est pas fait interdiction au salarié d’exercer une activité rémunérée chez un autre employeur.

Celui-ci peut donc tout à fait décider de travailler dans une autre entreprise (ou de créer sa propre entreprise).

Mais alors, du coup… peut-on signer un CDI pendant un congé sabbatique ? Et bien oui aussi ! A condition bien sûr de se mettre alors en règle avant la fin de son congé.

Mais par ailleurs, le contrat de travail est uniquement suspendu pendant un congé sabbatique. Le bénéficiaire doit donc continuer à respecter, vis-à-vis à de son premier employeur :

  • une obligation de discrétion et de loyauté
  • d’éventuelles clauses particulières de son contrat de travail (non-concurrence, exclusivité)

A noter que ces obligations concernent également les personnes qui préfèreront choisir un congé sans solde. Et que leur non-respect peut justifier des sanctions disciplinaires (licenciement du salarié). Voire même pénales (paiement de dommages-intérêts à son employeur).

La journaliste Nina Godart a consacré à cette opportunité un de ses rubriques Happy Boulot sur BFM TV :

Attention, la Loi Travail a modifié fin 2016 certains des critères évoqués dans cette vidéo, concernant le refus ou le report du congé sabbatique par l’employeur. Je te renvoie à mon article pour connaître les conditions en vigueur du congé sabbatique.

Obligation de loyauté

L’obligation de loyauté s’impose à chaque salarié. Sans avoir besoin d’être mentionnée dans le contrat de travail (elle est “d’ordre public’”).

Elle vise à garantir l’exécution du contrat de travail “de bonne foi” et à prévenir des comportements abusifs. Les cadres sont même soumis à une “obligation de loyauté renforcée”.

Cette obligation comprend un devoir de fidélité, de confidentialité et de non-concurrence. Et ce, durant toute la durée du contrat de travail, même suspendu par un congé sabbatique.

Il serait ainsi juridiquement répréhensible de s’engager dans une concurrence déloyale envers son premier employeur.

Ce qui serait le cas par exemple si tu divulguais des informations confidentielles ou dénigrais ton employeur. Comme si tu détournais sa clientèle ou travaillait pour un de ses concurrents. Au sens large, si tu portais préjudice à ton employeur.

Clauses particulières du contrat de travail

Une clause de non-concurrence vise à interdire au salarié de travailler pour un autre employeur concurrent. Dans la limite d’une zone géographique définie.

Elle n’est pas suspendue pendant un congé sabbatique. Ses effets s’appliquent également en cas de création ou reprise d’entreprise.

La présence d’une clause d’exclusivité dans ton contrat de travail t’interdit purement et simplement de travailler pour un autre employeur pendant ton congé sabbatique (concurrent ou non).

Toutefois, durant un congé sabbatique, elle ne t’empêche pas de créer ou de reprendre une entreprise. A condition alors que celle-ci n’entre pas en concurrence avec ton employeur.

Peut-on travailler pendant un congé sabbatique : mais pour quoi faire ?

L’affaire est donc maintenant entendue. Il est possible de travailler pendant une année sabbatique, pourvu que tu respectes les obligations ci-dessus.

Et reconnaissons-le, celles-ci laissent la porte ouverte à plein de possibilités fascinantes !

Quelles sont celles qui vont traditionnellement intéresser les candidats “sabbatiqueurs” ?

Concrétiser un projet professionnel

C’est l’un des motifs fréquemment mis en avant pour envisager un congé sabbatique (par 12% des personnes selon une étude de Opodo Voyages).

Et c’est l’un de ceux que je te recommande sur ce blog ! 🙂

Quelle meilleure opportunité qu’un congé sabbatique de 11 mois pour enfin sérieusement envisager de faire autre chose ? Pour trouver une activité qui corresponde davantage à tes attentes, ou même pour la créer ?

Tester une reconversion professionnelle

Durant ton congé sabbatique, tu peux t’engager dans une formation professionnelle avec beaucoup plus de disponibilité que quand tu exerces ton travail.

C’est donc l’occasion rêvée de te former à un métier qui correspond davantage à tes attentes ! Celles que tu as parfaitement identifiées aujourd’hui mais qui t’étaient étrangères au moment de choisir ta formation initiale…

Mais tu peux également commencer à exercer ce métier et à le tester chez un nouvel employeur. Ce qui te permettra d’avoir davantage de certitudes à la fin de ton congé. Et d’envisager beaucoup plus sereinement une éventuelle démission.

Monter son entreprise

Si tu as l’âme d’un entrepreneur, un congé sabbatique peut être l’outil parfait pour affiner ta réflexion et ton projet.

Quitte à enchaîner sur un congé création d’entreprise si 11 mois ne suffisent pas à valider ton business plan.

Tu peux parfaitement créer (ou reprendre) ton entreprise durant ton congé sabbatique et commencer à dégager des revenus de son activité.

Si les résultats ne sont pas à la hauteur de tes espérances, tu as la sécurité de pouvoir reprendre ton emploi à la fin de ton congé.

Dans ce cas, il est fréquent d’appréhender la réaction de son employeur. Que va-t-il penser si tu reviens “par défaut” chez lui ?

Sache tout d’abord que tu n’es pas tenu de lui parler de ce projet professionnel (le congé sabbatique n’a pas à être justifié). Même si je considère pour ma part qu’il est préférable d’être transparent.

Ensuite, sois certain qu’en te lançant dans un tel projet, tu vas te mettre en situation d’apprendre énormément de choses durant ton congé sabbatique.

Et que ces nouvelles compétences peuvent tout à fait intéresser ton employeur. Tout comme un recruteur qui te questionnerait sur l’utilisation que tu as faite de ton congé !

Réaliser une période d’essai dans une autre entreprise

 Voici une utilisation encore plus surprenante d’un congé sabbatique !

Mais qui pourra t’intéresser si tu hésites à changer d’employeur par crainte de ne pas être retenu à l’issue de ta période d’essai.

En effet, il n’est pas toujours facile de quitter un CDI sans certitudes sur le fait que ton nouvel employeur te conservera… ou bien sur le fait que tu apprécies ton nouvel environnement de travail !

C’est peut-être aussi une réflexion qu’on se fait davantage passée la cinquantaine, quand on craint de ne pas retrouver facilement de travail.

Sache que tu peux tout à fait réaliser une période d’essai durant un congé sabbatique.

A condition, là aussi, de respecter tes obligations contractuelles.

Si tout se passe bien, tu donneras alors ta démission une fois ton nouveau CDI validé (il faut que la durée de congé restante à ce moment-là couvre ton préavis).

Dans le cas contraire, tu reprendras ton poste chez ton employeur à l’issue de ton congé. En ayant profité de quelques mois de repos après ta période d’essai infructueuse, que celle-ci aura permis de financer.

Alors « peut-on prendre un congé sabbatique pour travailleur ailleurs ? », la question te semble-t-elle toujours aussi incongrue ? 😉

Contribuer au financement du congé sabbatique

La contrainte financière est celle qui rebute la majorité des candidats “sabbatiqueurs”.

Selon moi, elle est souvent exagérée car peu de personnes prennent le temps de déterminer sérieusement le budget d’une année sabbatique.

Il n’empêche que celle-ci peut réellement être un frein, en particulier si tu projettes un tour du monde.

Quand l’épargne disponible ne suffit pas pour combler l’écart entre dépenses et revenus, beaucoup baissent les bras et rangent à regret leur rêve de voyage au long cours dans leur malle…

Pourtant, il existe une solution pour boucler le financement : travailler pendant son année sabbatique !

Travailler en France

Si tu n’as pas prévu de quitter la France, pourquoi ne pas envisager d’y travailler à temps partiel chez un nouvel employeur ? Ou de prendre un emploi saisonnier ?

Cela contribuera à te changer les idées et te permettra de garder suffisamment de temps libre pour mener à bien tes autres projets. Et aller voir ailleurs en découvrant un nouveau métier ou une nouvelle entreprise, cela pourrait bien au passage booster ta créativité !

Travailler à l’étranger

Vietnamiens en train de récolter du sel, une option pour travailler à l'étranger pendant un congé sabbatique
Image by Quang Nguyen vinh from Pixabay

Si tu souhaites voyager hors de l’Hexagone, différents dispositifs peuvent te permettre de concilier voyage et activité rémunérée :

  • le programme vacances-travail (PVT, toutefois réservé aux 18-30 ans pour les ressortissants Français), visa qui permet de partir à l’étranger pour une durée d’un an dans l’un des pays participant au programme pour y voyager et y travailler

  • pour les plus jeunes (16-25 ans), le Service Civique propose des missions (temps partiel ou temps plein) rémunérées, en France mais aussi à l’étranger

  • pourquoi ne pas envisager de donner des cours de français (voire d’anglais si tu te débrouilles bien) dans le(s) pays que tu comptes aller visiter ?

Et il existe une dernière solution, le volontariat semi-rémunéré, de type « gîte et couvert contre travail »:

  • le Wwoofing est un exemple de programme de ce type (l’expression vient de l’acronyme WWOOF : World-Wide Opportunities on Organic Farms, réseau mondial de fermes biologiques), qui te permettra d’apprendre des techniques d’agriculture biologique

  • le service « Au pair » est une alternative, pour les célibataires de 17-30 ans qui trouvent une famille d’accueil et contribuent à s’occuper de ses enfants

  • avec le Home Sitting, tu peux être logé (mais pas nourri) gracieusement par des propriétaires en assurant la garde de leur domicile (et entretien jardin, piscine…) et de leurs animaux

  • enfin, périodiquement, on voit apparaître des propositions exceptionnelles permettant de voyager tous frais payés : récemment, Airbnb te proposait ainsi de partir 2 mois aux Bahamas pour un voyage solidaire dans une oasis écologique (https://www.plumetismagazine.net/conge-sabbatique-bahamas-sabbatical-airbnb/)

Pourquoi ne pas travailler pendant ton congé sabbatique ?

Tu l’auras compris, il est tout à fait possible d’exercer une activité rémunérée durant ton congé sabbatique. A condition essentiellement de ne pas concurrencer ton employeur.

Cela ouvre la porte à la concrétisation d’un projet professionnel de type reconversion professionnelle ou création d’entreprise.

Qui a toutes les chances d’avoir un effet durable s’il te permet de vivre davantage aligné avec tes valeurs et tes aspirations.

Mais cela donne également “simplement” la possibilité de boucler le budget d’un tour du monde.

Alors bien sûr, cela ne te permettra pas de passer toutes tes journées les doigts de pied en éventail sur une plage à l’autre bout du monde, ni même de visiter 12 pays en 6 mois.

Mais si tu n’as pas les moyens de te financer de tels voyages, c’est une option à ne pas négliger pour pouvoir tout de même prendre un break, te changer les idées et découvrir plein d’autres choses !

As-tu déjà envisagé de travailler pendant un congé sabbatique ? Je serais curieux de découvrir ton point de vue dans les commentaires ci-dessous !

Ai-je réussi à te convaincre que cela pouvait avoir des vertus ? Ou fais-tu plutôt partie du clan de José Artur 😉 :

Je n’aime pas travailler la veille d’un jour de congé

J’espère que cet article t’a plu et qu’il te sera utile. Indique le moi en appuyant sur le petit pouce gris en haut ou en bas de l’article. N’hésite pas à le partager sur tes réseaux sociaux pour en faire bénéficier tes connaissances !

  • Nicolas dit :

    Merci pour cet article très intéressant Alexandre. Il m’a particulièrement parlé car j’ai récemment pris une année (11 mois) de congés sabbatiques… pour voyager en sac à dos ! Dans la préparation de ce grand projet (rêve d’une vie en fait), j’en suis naturellement venu à me renseigner sur le cadre légal de ces 11 mois… Et c’est effectivement là que je me suis rendu compte que même si moi je n’avais aucun secret pour mon employeur quant à mes projets, j’aurais parfaitement pu garder ça pour moi !! De quoi donner des idées quand on a un souhait de reconversion 😊😊😊

  • Alexandra dit :

    Un grand merci pour cet article très riche et détaillé. Je ne me doutais pas de tous ces avantages et opportunités qui font de l’année « sabbatique » une vraie opportunité professionnelle. Peut elle être également l’opportunité de rédiger un business plan afin de bénéficier d’un CEP (une démission ouvrant droit aux indemnités de chômage)? Je te remercie

  • Kevin Detem dit :

    D’abord je me suis dit « mais quelle est l’utilité de prendre un congé sabbatique si c’est pour travailler? »
    Mais la partie reconversion professionnelle me parle 🙂
    Surtout pour se lancer dans un projet. Se recentrer sur soi, réapprendre à connaître ses valeurs et son moteur…

    Je ne savais pas qu’on pouvait travailler pendant un congé sabbatique.
    C’est bon à savoir!
    Merci pour cet article!

  • Alexandre Willocquet dit :

    Et merci à tous les 3 pour vos commentaires ! 🙂
    @nicolas, oui, je pense que la confidentialité sur ses intentions apporte vraiment un plus quand on a un projet de reconversion pro. Après, tout dépend des liens avec l’employeur. Moi je trouve préférable de pouvoir également lui en parler, mais ce n’est bien sûr pas toujours souhaitable…
    Merci pour ton retour positif, @alexandra ! Je ne connais pas bien le cadre du CEP, je vais me renseigner là-dessus. Mais en théorie, je ne vois effectivement rien qui s’oppose à utiliser un congé sabbatique pour le préparer. C’est un peu pour moi comme préparer son business plan avant de demander un congé création d’entreprise.
    @kevin-detem, c’est le petit côté « polémique épicée » de cet article ! 😉 Et c’est exactement dans l’esprit que tu décris que j’ai pris mon propre congé de 11 mois.

  • katell dit :

    Hello Alexandre, je suis partie 2 ans autour du monde en voilier et je confirme qu’il ne faut vraiment pas négliger cette possibilité. Même en ayant budgété consciencieusement notre voyage nous avons eu des dépenses supplémentaires. Nous avons résolu la question en embarquant des passagers payants et en écrivant des articles pour des revues nautiques. D’autres navigateurs s’arrêtaient assez longtemps pour travailler quelques semaines ou mois ici ou là, c’était même devenu leur mode de vie. Donc oui, c’est possible, et d’ailleurs une fois parti, si on a vraiment besoin d’argent, on ne se pose plus la question…

  • Alexandre Willocquet dit :

    Merci pour ton retour éclairé, @katell. C’est très intéressant d’avoir le témoignage de personnes qui ont expérimenté cette possibilité ! Et tu ouvres une nouvelle porte avec la vente de « traversées » à d’autres voyageurs, même si c’est bien sûr dans un contexte bien spécifique.

  • Maëva dit :

    Bravo pour ton article qui est hyper complet et très bien expliqué !

  • Nicolas dit :

    En complément de mon premier commentaire, je rajouterais que j’émets même aujourd’hui l’hypothèse d’en prendre un second moins long pour travailler sur une reconversion… Il faut profiter de cette chance !

  • Alexandre Willocquet dit :

    @maeva, merci pour ton retour, ça fait plaisir ! 🙂
    @nicolas, un petit côté « serial sabbatiqueur » ? 😉 J’aime ça ! Il « suffit » d’attendre 6 ans…

  • Elodie dit :

    Article très pertinent avec un cadrage juridique complet. Je rêve de cette année sabbatique pour envisager de nouveaux projets.

  • Alexandre Willocquet dit :

    Merci @elodie. De nombreuses personnes en rêvent, encore peu franchissent le pas. Pourtant, ce n’est pas si inaccessible et je te confirme qu’on peut en profiter pour faire plein de choses et revivre ! 🙂

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